Définition des biais cognitifs
Le concept de biais cognitifs désigne un mécanisme de pensée qui altère le jugement humain. Il perturbe la prise de décision en introduisant des distorsions dans la perception et le raisonnement. Initialement explorée dans le domaine de la psychologie cognitive, l’étude des biais cognitifs s’est étendue à divers secteurs. Dans des domaines tels que l’UX Design et l’ergonomie, la compréhension des biais cognitifs est cruciale pour améliorer l’expérience utilisateur. Tout individu est sujet aux biais cognitifs, y compris les UX Designers !
Qu’est-ce qu’un biais cognitif ?
Un biais cognitif représente un schéma de pensée trompeur qui semble logique mais qui dévie de la réalité. Il facilite la prise de décision rapide en influençant les choix, notamment lorsque des informations abondantes doivent être gérées dans un laps de temps limité. Cette distorsion dans le raisonnement peut conduire à des résultats indésirables.
Mécanismes des biais cognitifs
Pour comprendre les origines des biais cognitifs, il est crucial de plonger dans les mécanismes de pensée humaine. Lorsque le cerveau doit agir ou donner un sens à un événement, il recourt à des croyances subjectives inconscientes. Ce processus comporte un risque de prise de décision erronée. Conscientiser ces mécanismes permet à l’individu d’exercer un meilleur contrôle sur ses choix.
Dans divers secteurs tels que les sciences cognitives, le marketing, la publicité et la conception d’expérience utilisateur, la connaissance approfondie des biais cognitifs permet de prédire et de comprendre les comportements des utilisateurs ou des consommateurs. En tout, 250 biais cognitifs ont été répertoriés, classifiés généralement selon les catégories suivantes :
- Biais sensori-moteurs (illusions liées aux sens et à la motricité)
- Biais attentionnels ou biais d’attention (problèmes d’attention)
- Biais mnésique (en rapport avec la mémoire)
- Biais de jugement (déformation de la capacité de juger)
- Biais de raisonnement (paradoxes dans le raisonnement)
- Biais liés à la personnalité (en rapport avec la culture, la langue, l’influence sociale)
Un exemple illustratif de ces biais peut être trouvé dans cette vidéo humoristique :
Origines des biais cognitifs : bref historique
La théorie des biais cognitifs a émergé dans les années 1970, grâce aux travaux pionniers des psychologues Amos Tversky et Daniel Kahneman. Ils se sont penchés sur les motivations derrière les décisions irrationnelles dans le domaine économique, mettant ainsi en lumière la pertinence de l’étude des biais cognitifs.
Par la suite, dans son ouvrage de 2012, D. Kahneman a distingué deux systèmes de pensée, nommés système 1 et système 2. Le système 1 fonctionne de manière automatique et incontrôlable, fondé sur des associations d’idées, de souvenirs et d’émotions. Cela conduit à une vision cohérente mais biaisée de la réalité. D’un autre côté, le système 2 est plus calculateur et structuré de façon plus lente, nécessitant un effort mental pour prendre en compte le système 1.
Il est important de noter que les biais cognitifs, autrefois considérés comme utiles pour faire face à des situations dangereuses et pour s’adapter aux changements, sont aujourd’hui perçus de manière négative. Il est fréquent de confondre les biais cognitifs avec la dissonance cognitive ou la distorsion cognitive, concepts liés à l’état émotionnel de l’individu et pouvant alimenter des pathologies. Ces derniers diffèrent des biais cognitifs dans leur nature et leur impact sur la pensée humaine.
En somme, la dissonance cognitive est la tension interne résultant de la confrontation de pensées, de croyances, d’émotions et d’attitudes contradictoires chez une personne. Elle est un phénomène étudié en psychologie sociale, soulignant les complexités des mécanismes de pensée humaine.
Biais cognitif, dissonance cognitive et distorsion cognitive
Les biais cognitifs ont longtemps été considérés comme des mécanismes de survie, permettant aux individus de réagir efficacement aux situations dangereuses et de s’adapter aux changements. Cependant, de nos jours, leur impact est généralement perçu de manière négative. Il est crucial de ne pas confondre les biais cognitifs avec la dissonance cognitive ou la distorsion cognitive, qui sont des concepts distincts empruntés au domaine des thérapies cognitives et comportementales. Ces derniers sont étroitement liés à l’état émotionnel de l’individu et peuvent contribuer au développement de certaines pathologies. Les distorsions cognitives, en particulier, se manifestent par des interprétations erronées des informations que nous percevons dans notre environnement.
Qu’est-ce que la dissonance cognitive ?
En psychologie sociale, la dissonance cognitive représente la tension interne qui émerge lorsque les pensées, croyances, émotions et attitudes d’une personne entrent en contradiction les unes avec les autres. Cela crée un état de malaise qui incite souvent l’individu à tenter de réduire cette incohérence en ajustant ses convictions ou ses comportements.
Biais cognitifs & Design : quels impacts sur l’expérience utilisateur ?
L’importance des biais cognitifs en design d’expérience utilisateur
Les champs des sciences humaines et des sciences cognitives contribuent significativement à l’expertise ergonomique, notamment dans le domaine de la conception d’expérience utilisateur (UX). Ces connaissances multidisciplinaires aident les UX Designers à créer des produits novateurs, des services, des applications ou des sites Web répondant de manière optimale aux besoins des utilisateurs. Les biais cognitifs, lorsqu’ils sont utilisés de manière stratégique en UX Design, jouent un rôle crucial en :
Compréhension de la psychologie humaine et empathie
Comprendre les besoins et les comportements des utilisateurs est essentiel pour concevoir des interfaces qui correspondent étroitement à leurs schémas de pensée.
Anticipation de l’usage et prévision de la réception
En utilisant les connaissances sur les biais cognitifs, les concepteurs peuvent anticiper la façon dont les utilisateurs interagissent avec un produit ou un service, même avant son lancement.
Amélioration de l’expérience utilisateur et augmentation du ROI
L’exploitation adéquate des biais cognitifs peut considérablement améliorer l’expérience globale de l’utilisateur, ce qui se traduit par une fidélisation accrue des clients et un retour sur investissement plus élevé.
Éthique et défis liés à l’utilisation des biais cognitifs en UX Design
L’utilisation des biais cognitifs dans le but de manipuler les utilisateurs soulève des questions éthiques importantes. L’application de techniques telles que les « nudges » pour influencer le comportement des consommateurs peut franchir la frontière entre persuasion éthique et manipulation. En outre, l’équipe de conception doit être consciente de ses propres préjugés psychologiques qui pourraient altérer sa compréhension des besoins des utilisateurs, ce qui pourrait conduire à des résultats de tests utilisateurs non pertinents.
Biais cognitifs fréquemment rencontrés par les UX Designers et les utilisateurs
Lors des tests utilisateurs, plusieurs biais cognitifs peuvent influencer les résultats. Les concepteurs UX doivent être conscients des biais psychologiques qui peuvent les affecter ainsi que des biais qui pourraient involontairement influencer les utilisateurs à adopter certains comportements. Bien qu’il soit impossible de dresser une liste exhaustive de tous les biais cognitifs, il est essentiel de prendre en considération les plus courants.
Exemples de biais cognitifs
Principaux types de biais cognitifs
Catégorie de biais | Nom du biais cognitif | Description (définition) | Exemple pour l’utilisateur |
Biais mnésiques | Effet de récence
Effet de primauté |
Mieux mémoriser les dernières informations auxquelles on a été confronté.
Se souvenir des premières informations auxquelles on a été confronté. |
Le jugement va être fondé sur les dernières informations reçues par l’interviewer, y compris si elles ne sont pas essentielles.
Si une question comprend plusieurs jugements de valeur, l’utilisateur mémorise les premiers et y répond. |
Biais de raisonnement | Dissonance cognitive
Cadrage Biais de disponibilité |
S’il y a contradiction, le raisonnement se base sur la volonté d’éliminer la contradiction.
La façon de présenter la situation ou le problème modifie son interprétation. Ne se baser que sur des références ou informations immédiatement disponibles. |
Les valeurs, le ton ou la situation ne correspondent pas à ce que le consommateur imaginait, alors il y a ré-interprétation fausse de la situation.
L’utilisateur ou le consommateur fait un choix qui n’est pas le sien mais celui attendu. Avoir l’image d’un type de design (par exemple celui de la concurrence) et le sélectionner même si ce n’est pas le meilleur. |
Biais de jugement | Effet de halo
Ancrage |
Volonté de généraliser un jugement à partir d’un élément.
Influence de la première impression. |
Si le produit ou l’interface est esthétique, il a toutes les autres qualités requises.
Baser son jugement sur le 1er élément d’une page web ou d’un menu. |
Biais liés à la personnalité | Conformisme / Effet de mode | Tendance à croire ce que la majorité pense et à vouloir lui ressembler. | Si un nombre important d’utilisateur a tel avis, les autres aussi. |
Comprendre les Biais de jugement et l’immunité à l’erreur
Le processus de conception est souvent entaché par des biais de jugement et l’immunité à l’erreur. Pour un designer, reconnaître ces obstacles est essentiel pour garantir la qualité et la pertinence de son travail. Le biais d’immunité à l’erreur, par exemple, se manifeste par une difficulté à détecter ses propres erreurs ou défauts dans la conception du produit. Ce phénomène est souvent exacerbé par l’effet IKEA, où l’investissement personnel dans une tâche peut influencer la perception de la valeur du résultat.
Les risques associés aux Biais de jugement
Un autre défi majeur est le biais d’échantillonnage ou échantillon biaisé. Il se matérialise lors du choix d’un groupe d’individus non représentatif des utilisateurs finaux, ce qui fausse les conclusions tirées des tests d’utilisabilité ou des focus groups.
Stratégies pour contrer les Biais de jugement
Pour contrer ces biais et garantir des résultats objectifs, il est crucial d’adopter des stratégies appropriées. Certaines attitudes sont recommandées, notamment :
Travailler en équipe pour favoriser l’objectivité
Travailler en équipe offre l’avantage de gagner en objectivité et de prendre du recul par rapport à la conception initiale. Cela permet de limiter les effets de l’immunité à l’erreur.
Garder à l’esprit les Biais de jugement fréquents
Il est essentiel de garder à l’esprit les biais cognitifs possibles et de les noter systématiquement lorsqu’ils se produisent. Cette prise de conscience permet de rectifier les erreurs de jugement potentielles.
Adopter des hypothèses plutôt que des préjugés
Il est crucial pour un designer de laisser de côté ses préjugés et de se contenter d’hypothèses basées sur des données tangibles et des observations objectives.
Encourager l’expression des utilisateurs
Même lorsque les utilisateurs restent silencieux, il est essentiel de les encourager à s’exprimer librement. Le silence peut parfois cacher des points de vue critiques ou des problèmes non évoqués.
Sélectionner un échantillon représentatif
Lors des tests utilisateurs ou des études de marché, il est impératif de choisir un échantillon représentatif de la cible visée. Cela garantit que les conclusions tirées sont réellement applicables et pertinentes pour le public cible.
Se plonger dans les expériences passées des utilisateurs
Comprendre les expériences passées des utilisateurs et le contexte dans lequel ils s’expriment est crucial pour concevoir des produits qui répondent à leurs besoins réels.
Conclusion
En somme, pour assurer la pertinence et la fiabilité des tests utilisateurs et des processus de conception, il est primordial de reconnaître et de contrer les biais de jugement et l’immunité à l’erreur. Travailler en équipe, garder une attitude ouverte et objective, et sélectionner des échantillons représentatifs sont autant de mesures essentielles pour garantir des produits et des interfaces de qualité adaptés aux utilisateurs finaux.
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image à la UNE : Handful of tools – James Oconnell – Dribbble